Fin des quotas laitiers
Euronext, le marché de référence des grains en Europe, va lancer trois contrats à terme de produits laitiers. Ce « complexe laitier » sur les marchés à terme constituera, selon Euronext et Agritel, une référence européenne de prix du lait aujourd’hui inexistante. Les contrats à terme permettront aux industriels et éleveurs de se couvrir contre la volatilité des prix, qui risque d’augmenter avec la fin des quotas laitiers à partir du 1er avril 2015.
A l’instar du marché des grains, les éleveurs et industriels de la filière laitière pourront bientôt utiliser les marchés à terme. Euronext, le marché de référence européen pour les céréales et oléagineux, va lancer au printemps prochain un « complexe laitier » constitué de trois contrats à terme pour la poudre de lait écrémée, le beurre et la poudre de lactosérum.
Avec la fin des quotas laitiers au 1er avril 2015, les marchés laitiers européens, « déjà soumis à la volatilité des marchés internationaux, seront encore plus sensibles à l’équilibre offre/demande », expliquent Michel Portier et Pierre Begoc, respectivement directeur général et directeur des affaires internationales d’Agritel. Selon eux, le lancement de ces trois contrats répond à une demande d’opérateurs, acheteurs et vendeurs, européens.
En lançant ces contrats, probablement courant avril ou mai, Euronext vise deux objectifs : créer une référence européenne des prix du lait et offrir aux opérateurs, les industriels laitiers, mais aussi les éleveurs, des outils de couverture du risque prix à l’instar de ce qu’utilisent bon nombre de céréaliers.
Pour Euronext, il s’agit de la deuxième tentative d’ouverture de contrats à terme. Fin 2010, le marché européen avait déjà lancé un contrat à terme sur la poudre de lait écrémé. Mais faute d’acteurs suffisants positionnés, le marché n’avait jamais réellement fonctionné. « Nous avions trop anticipé et nous aurions dû, à l’époque, lancer un contrat aussi sur le beurre, détaille Nicholas Kennedy.
Des prix Matif aiguilleurs des prix payés aux producteurs
Comme le contrat à terme du blé tendre, les contrats laitiers seront « livrables », c’est-à-dire qu’un opérateur aura la possibilité d’aller jusqu’au terme du contrat et livrer la marchandise. « C’est une caractéristique importante pour faire le lien entre le marché à terme et le marché physique. ». Les contrats seront cotés à Amsterdam, et auront Anvers, Hambourg et Rotterdam pour « ports d’attache ». La taille du lot sera inférieure à 24 t. Les critères de qualité de référence seront ceux imposés dans le cadre du mécanisme d’intervention européenne.
Agritel estime qu’il n’y a actuellement pas de prix de référence des produ
its laitiers en Europe, ce qui alimente ainsi l’absence de visibilité des opérateurs et des éleveurs. Les prix Matif constitueraient une référence pour la fixation des prix payés aux éleveurs, en France ou chez nos voisins européens. Et tant « qu’il n’y a pas de référence de prix à l’échelle européenne », Agritel se refuse à toute analyse sur les perspectives de prix du lait dans les mois à venir.
L’introduction et le développement de contrats à terme laitiers
constituera aussi une importante source de développement pour les sociétés de conseil comme Agritel. Offre et demande agricole, autre société de conseil en gestion de risque prix, l’avait aussi évoqué lors du Space 2014 en septembre dernier.
Besoins de formation des éleveurs
« Les éleveurs n’iront pas directement sur le marché à terme, mai
s utiliseront des outils structurés par leur collecteur privé ou leur coopérative, comme le font les producteurs de grandes cultures », poursuit Michel Portier. Agritel compte lancer des formations, tant destinées aux éleveurs qu’aux industriels, pour leur expliquer le fonctionnement des marchés à terme et l’intérêt qu’ils auront à les utiliser pour se couvrir des trop fortes fluctuations de prix. »
La plus grande volatilité des prix des produits laitier
s sera l’une des conséquences de la fin des quotas laitiers à partir du 1er avril 2015. En France, cette volatilité reste faible, autour de 10-12 %. « Mais en Nouvelle-Zélande, où le marché est totalement libéralisé, elle est supérieure à 25 % » avait expliqué Sylvain Mégrier, d’Oda lors du Space 2014.
Outre cette volatilité, Agritel assure, comme la plupart des spécialistes économiques, que le marché du lait est sur une tendance très porteuse. « D’ici 2022, la consommation globale de produits laitiers en Chine devrait augmenter de 40 à 65 %. » La société n’a aucun doute sur le fait que l’Europe, et plus particulièrement la France « qui se distingue par la qualité et la traçabilité de sa production », trouvera sur le marché asiatique les opportunités pour exporter ses volumes supplémentaires. « La production européenne devrait augmenter d’environ 8 % d’ici 2020 ».